La réduction de moitié de l’usage des pesticides en France était en 2007 un objectif porté par FNE, validé par le gouvernement en place à l’époque et partagé alors par l’ensemble des acteurs lors du Grenelle de l’environnement. Le plan Ecophyto, adopté en 2008, représente pour FNE la colonne vertébrale de l’agro-écologie. C’est un plan remarquable dans sa conception, unique en Europe, très élaboré, avec de nombreuses actions indispensables à la diminution du recours aux pesticides. Sa mise en œuvre nécessite une forte volonté politique qui a fait défaut jusqu’à ce jour.
Ainsi, après 5 années de mise en œuvre et malgré les efforts et les moyens déployés, les résultats ne sont pas au rendez-vous en termes de réduction d’usage. Localement, les fédérations membres de FNE actives dans les CROS constatent, depuis 2012, un essoufflement dans la mise en œuvre du plan Ecophyto sur le terrain (enquête réalisée durant l’été 2014). La fédération livre son analyse et ses propositions pour la deuxième version du plan.
Les orientations stratégiques
Pour FNE, au-delà des difficultés de mise en place du plan, aujourd’hui en grande partie résolues puisque la plupart des actions sont déployées sur le terrain, l’absence de résultats du plan s’explique par :
- l’affaiblissement du message constaté au niveau national (suppression de l’échéance 2018 dans les discours voire remise en question de l’objectif de 50%) et au niveau régional. En effet, si l’animation locale est un levier fondamental, la motivation des responsables locaux (DRAAF et Chambres) n’apparaît pas toujours évidente. Dans certaines régions, le nombre de participants aux réunions des CROS s’est considérablement réduit avec le temps (ex. Basse-Normandie) ou encore les informations sur les CROS ne circulent plus (ex. PACA).
- un manque de lisibilité sur le terrain du fait de la juxtaposition de plans et programmes (Ecophyto, PRAD, PDRR, etc.).
- le retard pris dans la mise en place de certains outils (indicateurs de suivi nationaux et régionaux, Agrosyst) et l’absence de rapport annuel au Parlement prévu par la législation issue du Grenelle. Cette faiblesse des indicateurs se ressent sur le terrain, notamment en régions PACA et Basse –Normandie. En Martinique, c’est encore le QSA qui est utilisé dans la note de suivi relative à l’année 2012 !
- un « décrochage » de la profession agricole (en particulier la FNSEA et une majorité de coopératives), qui avait pourtant approuvé le plan au départ. Très perceptible au niveau national, cette absence de motivation de la profession agricole est soulignée par plusieurs fédérations membres de FNE, notamment dans les régions Bourgogne, PACA, Centre, Basse-Normandie et Pays de la Loire. Ceci s’explique, selon FNE, en partie par un manque d’intérêt à agir des agriculteurs et des acteurs du monde agricole (syndicats, instituts techniques, chambres d’agriculture, coopératives). Certaines préconisations des instituts techniques (Arvalis, CETIOM, etc.) restent trop souvent attachées à la performance en termes de rendements à l’hectare plutôt qu’à la promotion d’une véritable stratégie d’agriculture durable utilisant moins d’intrants, en particulier moins de pesticides.
- un manque en France de recherche et d’expérimentation sur des rotations de cultures permettant une réduction conséquente de l’usage des pesticides.
- une inadaptation des filières amont et aval à la diversification des cultures.
Aussi, pour la version 2 du plan Ecophyto, les orientations stratégiques doivent porter sur :
- l’objectif de réduction globale de l’usage (- 50 %), qui doit être clairement maintenu et fortement porté par le niveau national vers les acteurs locaux. L’objectif global national de moins 50 % reste fondamental car il correspond à un changement en profondeur de l’agriculture (démarche agro-écologique) qui va bien au-delà de l’amélioration des techniques, cette dernière étant bien évidemment nécessaire. Changement de techniques et changement de système doivent être menés de front et un objectif ambitieux dans des délais proches doit être de nature à créer une véritable dynamique d’inversion de la courbe d’usage des pesticides. Les objectifs régionaux doivent s’inscrire dans ce cadre. Les efforts doivent permettre d’orienter en profondeur l’agriculture française vers l’agro-écologie, en visant une agriculture durable sur les plans économique, social et environnemental plutôt qu’une agriculture productiviste dont le seul objectif serait de maintenir un haut niveau de rendements. Sur le plan économique, un raisonnement en termes de marge sera donc plus approprié qu’un raisonnement en termes de chiffre d’affaires.
- une impulsion et des consignes fortes des décideurs nationaux en particulier sur les objectifs et les délais. FNE rappelle qu’il sera impossible, sur le terrain, de « juxtaposer les dynamiques » notamment entre projet agro-écologique et plan Ecophyto. La réduction de l’usage des pesticides étant un axe fondateur de l’agro- écologie, une ligne directrice forte et cohérente doit être donnée par les décideurs politiques nationaux.
- l’activation de leviers « externes » aux agriculteurs et applicateurs pour déclencher
leur intérêt dans la démarche :
- les activités permettant de développer des outils à la disposition des agriculteurs (enseignement agricole, conseil, amont, aval, etc.)
- les politiques structurelles complémentaires au plan Ecophyto (fiscalité, réglementation, homologation, PAC)
- la sensibilité croissante de la société aux questions de santé-environnement.
Les gros titres des propositions
- Les orientations stratégiques
- Les actions à poursuivre et a renforcer
- Les actions à faire évoluer
- Les actions à « sortir » du plan
- Les nouvelles actions à mettre en place
- Les leviers complémentaires
- la gouvernance
- le rôle de FNE dans la V2
Synthèse enquête APNE
Dans le cadre de l’élaboration, par le député Dominique Potier, d’une nouvelle version du plan Ecophyto, FNE a lancé une enquête auprès de ses fédérations membres durant l’été 2014. Huit fédérations ont répondu, correspondant aux régions Basse-Normandie, Bourgogne, Centre, PACA, Pays de la Loire, Languedoc- Roussillon et Rhône-Alpes. En voici les principales conclusions.