Ce compte rendu d’un auteur signant MCM a été publié sur le [forum-chômage]
Le FORUM SOCIAL EUROPEEN, ce que je peux en dire
Le FORUM SOCIAL EUROPEEN, ce que je peux en dire n’ayant comme tout le monde participé qu’à une toute petite partie des réunions sur les centaines organisées :
Ces cinq jours ont été un voyage dans des mondes divers aux langages multiples, une ambiance de fête, de musiques - bonheur de retrouver les amis, recherche dans les stands et le village solidaire, repas de la confédération paysanne, shorba et crêpes le soir au Glad (organisations de jeunes et des sans), conférences et débats en 5 langues et projection écrite, autour de l’enfance, du handicap, des droits sociaux, des services publics, de la santé, de l’éducation, des énergies, de l’agriculture . - actions - media alternatifs - accueil avec Solidaires des bénévoles, des interprètes, des journalistes et des égarés.
Plus de 50 000 délégués venus de toute l’Europe ont été accrédités - plus de délégations de l’est et d’Europe centrale qu’à Florence, des délégations des autres continents avec en perspective le Forum Social Mondial à Mumbaï en janvier - succès de l’Assemblée des femmes, forte participation de la jeunesse, interventions des No vox et de la jeune désobéissance sociale.
Des évènements marquants :
– la prise de parole des intermittents à l’
ouverture du FSE et très beau spectacle pyrotechnique : mots, musiques pendant que les symboles de cette vieille société néo-libérale disparaissaient peu à peu dans les flammes et les feux d’artifice, entourés des tipis de la renaissance multiple
– la manifestation des intermittents et des chômeurs devant l’Unedic le jeudi contre la convention que le Medef et
la CFDT, jusqu’alors dans l’illégalité, ont fait passer en force
– la réunion des jeunes zappatistes
– l’occupation de locaux pour et par « les sans » - notre « sortie » manifestation avec chars et animations défilant de
14h à 20h de la République à Bastille et Nation
– les protestations devant la prison de la santé suivies d’arrestations (intervention de la leagal team)
– le climat serein dans l’espace Glad pourtant trop étroit, les échauffourées devant les salles trop pleines
– l’assemblée des mouvements sociaux
– les interventions pour les 5 personnes emprisonnées à
Thessalonique pendant le dernier sommet européen et qui en sont à 50 jours de grève de la faim
– souvenir de Carlo.
– les personnes que l’on a côtoyées (Toni Negri, Miguel Benasayag, Luca Casarini .)
Le Forum Social Européen n’a pas seulement été un lieu de débats, de confrontation et d’élaboration ; les mouvements sociaux dans leur diversité ont discuté des campagnes à venir, de l’élaboration d’alternatives, de la construction d’un mouvement social à l’échelle européenne.
Des réseaux se sont constitués ou élargis et des journées de luttes ont été décidées : pour les droits sociaux, le revenu et le logement du 22 au 28 novembre en Italie,
à Padoue, pendant la conférence intergouvernementale
– Manifestation "contre le chômage et la précarité" à Paris samedi 6 décembre (départ de Denfert Rochereau à 14 h)
– « Journée européenne d’action contre la répression et
l’exploitation, pour la liberté de circuler et de s’installer, pour la régularisation des sans papiers » le 31 janvier
– Manifestations « contre la guerre, pour la démocratie, la paix et l’autodétermination des peuples » le
20 mars suite à l’appel lancé par le mouvement anti-guerre aux USA
– Manifestations « Pour une Europe des droits dans un monde sans guerre » le 9 mai, date prévue de la ratification de la Constitution européenne.
Le PROCHAIN FSE se déroulera à Londres en 2004 : il a été demandé que celui-ci soit moins éclaté (trop de distances entre les lieux et sites autour de Paris)
ANALYSES
CI-DESSOUS DES BRIBES D’ANALYSES développées au cours de plénières et séminaires sur les thèmes de l’altermondialisation, la guerre, la constitution européenne, les droits sociaux et le revenu garanti, le processus de désobéissance, le travail, le bien commun.
D’autres compte-rendus devraient étoffer ce texte (services publics, écologie.)
L’ALTERMONDIALISATION : refus de ce monde injuste (guerre globale, droits violés, violence du pouvoir) ; moyens de lutter contre le capitalisme et ses excès ; le but n’est pas le pouvoir, mais la construction maintenant d’un, d’autres mondes possibles ; débat horizontal, nouveau schéma vers la nouvelle démocratie que nous voulons tous ; construction de nouveaux liens avec 1000 idées de démocratie directe.
Constat de 2 évolutions dans le mouvement :
– un mouvement d’opinion se transformant en lobbying, utilisant la démocratie représentative.
– un espace public qui met en pratique un autre monde possible, résiste à l’empire, développe le bien commun, lutte pour de vieux et nouveaux droits.
Sur LA GUERRE :
Le capitalisme, système économique qui crée misère et inégalités a besoin de guerre permanente pour exister, guerre contre les peuples, guerre contre les pauvres, violations des droits, violation permanente de l’Etat de droit.
Occupation militaire de la Palestine, de l’Irak et en Europe, de la Tchétchénie.
Les grandes puissances se jettent sur les lieux qu’ils ne contrôlent pas encore comme sur un pot de miel : les entreprises américaines se partagent l’Irak. « Les USA ne s’arrêteront pas ; d’autres Etats « voyou » seront attaqués pour contrôler le monde. Seuls les peuples du monde peuvent l’arrêter ».
Opposer une Europe militarisée rendrait le monde encore plus instable. Les interventions ont mis en évidence des convergences sur l’Europe que nous voulons : propositions, élaboration d’alternatives pour le droit à la dignité, sans guerre, sans occupation, sans oppression, pour le retrait des armées et polices de toutes les terres occupées, d’actions pour la démocratie, la paix, l’autodétermination des peuples : Caravane des droits pour la Paix et la justice autour du 20 mars en Irak, Kurdistan, Iran, Israel et Palestine, campagnes contre le mur, 20 mars journée d’action contre la guerre.
« La Paix est une valeur fondamentale. lutter contre la guerre et le régime impérialiste . la guerre n’est pas seulement une main mise sur le pétrole mais une guerre constituante, force externe et interne, guerre de police qui investit les rapports sociaux . lutter pour la paix - lutte sociale. Pour s’opposer à ce modèle de développement... Proposition de reconstitution d’une gauche pacifique pour une société démocratique de tous pour tous. » Toni Negri.
La CONSTITUTION EUROPENNE proposée est le produit de la politique néolibérale menée en Europe depuis 25 ans ; elle entérine la destruction des services publics et des droits sociaux ; elle est inacceptable ; la changer.
« En ce moment s’élabore un projet de Constitution européenne en marge de la société civile. Il "constitutionnalise" le libéralisme comme doctrine officielle de l¹UE ; il consacre la concurrence comme fondement du droit communautaire et de toutes les activités humaines et ne tient aucun compte des objectifs de l¹éco-développement ; il accorde un rôle à l¹OTAN sur les politiques étrangères et de défense européennes et pousse à la militarisation de l’Union ; enfin, il maintient le social dans le statut de pièce rapportée d¹une construction européenne fondée sur le primat du marché, et acte, de fait, le démantèlement déjà programmé des services publics. Ce projet de Constitution ne répond pas à nos aspirations ». Appel de l’assemblée des acteurs et mouvements sociaux le 16 novembre 2003.
L’assemblée des femmes, 7000 à Bobigny, dénonce le projet constitutionnel européen qui élimine l’égalité homme femmes, et risque de réintroduire les religions et le patriarcat . Elle propose une campagne pour l’égalité professionnelle, contre les violences, pour l’individualisation des droits sociaux.
Remarque suite aux comportements de libéraux et « experts » trop souvent plus prompts à condamner qu’à débattre (issue du manifeste de Droits devant !!) :
« L’orientation libérale comme choix de gouvernement depuis deux décennies provoque une érosion continue des droits fondamentaux. les effets néfastes se traduisent par une progression massive et une banalisation de la précarité, de la pauvreté et des inégalités. » cette situation est le résultat de décisions politiques prises au nom d’une soi-disante rationalité économique mondialisée. cette mécanique meurtrière érige la compétition en principe fondamental, instituant un état de guerre permanent ou l’Autre est désigné comme concurrent - ennemi. La pensée qui véhicule cette idéologie apparaît alors pour ce qu’elle est : une pensée cynique ! ».
Pour le mouvement, il s’agit de créer une dynamique de construction d’une Europe basée sur une citoyenneté de résidence, une autre politique agricole commune, inclure les pays de l’Est, arrêter avec les technologies mortifères mondiales soumettant les paysans aux entreprises semencières, une Europe où tous les droits des êtres humains l’emportent sur le droit du profit, de la concurrence, de la logique du marché.
Pour cela, se mobiliser par un processus, un combat commun.
Des luttes et actions se développent pour se réapproprier les moyens d’existence, s’opposer à ce modèle de développement, pour la liberté de circuler et de s’installer, l’hospitalité libre (pétition contre le délit de solidarité sur www.gisti.org), le droit au logement, à l’auto-construction, la non brevetabilité, le droit d’existence et non droit à la subsistance, les droits garantis pour tous, égalité des droits, harmonisation par le haut.
JOURNÉE DE MOBILISATION ET DE MANIFESTATION EU EUROPE LE 9 MAI 2003 POUR UNE EUROPE DES DROITS DANS UN MONDE SANS GUERRE
Pour les DROITS SOCIAUX, le REVENU GARANTI
Dans ce monde à construire, droit à une existence digne, refus de la précarité, contre le travail capitaliste :
Le système, uniquement dirigé vers les gains, entraîne des désastres. « Le projet de globalisation prive des droits les plus élémentaires et accroît la précarisation. Nous voulons le changer car nous ne supportons pas un monde dominé par la guerre et l’exploitation. »
« Dans le capitalisme, tout le monde fait la guerre à tout le monde et surtout aux pauvres. Le capitalisme a besoin de nouvelles marchandises à vendre, alors elle lorgne vers la santé, l’éducation . » (COBAS). Résister à la baisse des salaires, lutter contre la dégradation de l’emploi.
Ce système est en faillite ; le mouvement altermondialiste propose des alternatives qui se construisent déjà dans ce mouvement multiple en marche, qui se questionne et avance -comment défendre le bien être, paiement du travail salarié et non salarié, comment atteindre une forme de société où toute forme de travail est reconnu - le travail actuel impose une marchandisation de tous les temps de la vie, la vie est alors réduite à une marchandise. Même si le travail mesurable est en décroissance, les temps de subordination non directe augmentent. Auto-contrôle des sujets qui mettent leur cerveau au service de l’accumulation des profits. Le refuser, refuser le productivisme qui lui est attaché, refuser la vente de la force de travail comme seule voie d’émancipation, seul moyen de survie ; le fait de vivre est productif.
– Remettre les choses à leur place, réaffirmer la primauté du politique sur la logique de travail, réappropriation du temps personnel, de la richesse produite, garantir la sécurité du revenu, l’accès à la monnaie à tous en redistribuant les gains de productivité à tous, gains actuellement attribués seulement à une minorité. Nouveau monde du travail.
De nouvelles formes de lutte sont donc à construire en se rappelant qu’il y a 100 ans la grève alors pratiquée était hors la loi.
– Proposer comme moyen un revenu non conditionné par la prestation de travail : Le revenu garanti, individuel, pour les résidents (citoyens et migrants), non soumis à condition (travail, contrôle social), financé sur la richesse produite et la fiscalité au niveau européen.
PROCESSUS : DESOBEIR A L’ILLEGALITE
– refus de créer un consensus avec pouvoir et hiérarchie, autres modes d’actions pour devenir visibles, désobéir dans la vie quotidienne, refuser ce monde injuste, contester toute forme d’organisation qui concentre les pouvoirs et s’éloigne de la vie sociale.
Le mouvement de la désobéissance sociale, nouvelle façon de concevoir la politique et l’organisation, espace communiquant sans ligne politique, sans modèle, aux multiples formes, mouvement de multitudes en mouvement, dynamique sociale concrète, par des actions symboliques pour la reconquête des droits avec des objectifs concrets. La désobéissance, ensemble de pratiques qui affirment un autre monde possible.
SUR L’ORGANISATION DU TRAVAIL ET SON CONTENU ; SUR LA NOTION DE COMMUN.
Le travail , force productive du capital. Le dispositif de production est complexe avec pour centralité la propriété intellectuelle, et en périphérie la production matérielle et immatérielle dans un processus d’ouverture de possibles, donc imprévisible, non structuré à l’avance ; rapport entre temps et valeur.
Le travail immatériel est une nouvelle composante du travail (propriété intellectuelle, brevets, télécommunication .)
Les échanges augmentent la connaissance, ce qui augmente les échanges. Ce bien commun est infini.
Mais le système libéral qui libère la circulation des marchandises prétend bloquer la libre circulation de l’information, celle des logiciels libres, leur utilisation, et veut contrôler la production intellectuelle - les brevets ne protègent pas l’innovation, seule la dernière étape est valorisée alors que le travail est collectif ; en fait, ils freinent l’innovation.
Propositions d’une construction alternative basée sur le revenu, les droits sociaux et la libre connaissance (logiciels libres, liberté de copier, de redistribution, de modification), le partage de la connaissance, la liberté des échanges, ouvrant la capacité d’innovation ; créer le possible.
La propriété publique, non étatique, devient coopération collective, auto-formation, 3ème voie. Le commun n’est pas seulement patrimoine acquis où il y a rapports de production, rapports sociaux, : il est sphère publique, contenu positif, politique, discussion, conflit, décision, action, dynamique qui s’oppose au pouvoir et ouvre des formes d’innovation, de lutte, potentialité projetée dans le futur.