Pour ces (f)estives 2022 de la décroissance, nous poursuivons le « cycle des relations » entamé l’an dernier par « les relations avec la nature ». Cette année, les relations sociales seront analysées et discutées sous l’angle de la vie sociale. Pourquoi un tel cycle des relations ? Parce que la décroissance que la Maison commune défend – en tant que philosophie politique – est une philosophie relationnelle. Il s’agit toujours de poursuivre notre critique systémique de l’individualisme : non, au commencement, il n’y a pas des individus isolés et indépendants qu’il s’agirait de relier ; au commencement, il y a des relations et des interdépendances.
La Vie Sociale
C’est le philosophe François Flahault qui avait demandé de remplacer « vie en société » par « vie sociale », au moment de donner le droit de reprendre un extrait de son œuvre.
La « vie en société » serait plutôt la vie des individus dans la société alors que la « vie sociale » serait plutôt la vie de la société : il est assez facile de superposer à cette première opposition toute une série d’autres oppositions, par exemple : quand on veut « échanger » et c’est le leitmotiv d’une économie de marché, il faut d’abord des individus (qui produisent des surplus pour s’enrichir) ; ce qui n’est pas du tout la même chose que si on veut d’abord « partager », ce qui pourrait être la logique d’une économie de la coopération).
La conception du bonheur ne sera pas du tout la même : dans la vie en société, le malheur des uns peut faire le bonheur des autres alors que dans la vie sociale, chacun a droit à ce qu’Aristote appelait une « part de bonheur ».
L’enjeu
Si on accepte de ne pas confondre entre rejet, trajet et projet (qui sont trois façons de se mobiliser pour la décroissance) alors :
La décroissance, c’est le trajet que l’on peut définir comme l’« époque pendant laquelle la société s’organise démocratiquement pour repasser sous les plafonds de l’insoutenabilité écologique » ; ou comme l’organisation politique de la démarchandisation (plutôt Timothée Parrique).
Au sens le plus large, on mettra dans la décroissance aussi bien le rejet de la croissance + du capitalisme + du libéralisme, que tout ce qui va concerner la transition ou transformation ou redirection…, sans oublier le projet qui va pouvoir se nommer a-croissance, post-croissance, état stationnaire, buen vivir, etc.
Du coup, l’objectif de retrouver une « vie sociale » apparaît motivé :
– Par le rejet de « la croissance et son monde » en réaction au diagnostic qu’aujourd’hui la « vie en société » est « sociocidaire » : https://ladecroissance.xyz/2022/02/28/sociocidaire/
– Par le projet d’une vie humaine réorganisée non pas autour des valeurs de l’individualisme et de la domination mais des valeurs de partage, de coopération, d’émancipation, de confiance… sont déjà les initiatives qui cheminent avec une telle perspective ? Car les discussions sur la perspective peuvent faire rêver mais il s’agit de réaliser ses rêves – Sans tomber dans le danger symétrique de croire que des initiatives (réduites à la simplicité volontaire ou aux alternatives concrètes) peuvent être un chemin si elles se dispensent de se savoir en route vers une perspective explicitement politique (parce que dans ce cas-là, faute d’une telle perspective pour se penser comme des « intermédiaires », alors ces initiatives ne font que participer à la parcellisation, à l’archipélisation de la société, c’est-à-dire à la domination de « la vie en société » sur « la vie sociale », c’est-à-dire à un processus d’individualisation).
L’enjeu politique de la vie sociale
L’idée générale de la distinction entre « vie sociale » et « vie en société » est que dans le second cas, on répète la fable libérale qu’une société apparaît à partir des individus (c’est la fable d’un état de nature où les hommes vivent isolés, comme des robinsons, et où ils ne vivent ensemble qu’après avoir passé volontairement un contrat) alors que dans le premier cas, c’est l’inverse : un individu n’apparaît qu’à partir de la société, ou comme le dit le philosophe François Flahault : « la coexistence précède l’existence ».
Le socialisme s’oppose à l’individualisme ; et nous envisageons la décroissance comme socialisme du XXIème siècle, centré non sur le développement des forces productives mais basé sur la protection et l’entretien des forces de la « reproduction sociale ». La société précède les individus. Quand je nais il y a déjà une société, une langue, des techniques, des traditions, des habitats…
Politiquement, cela veut dire que l’objectif politique d’un tel socialisme, c’est de préserver, de conserver, d’entretenir ce qui est la base d’une vie humaine sensée. C’est donc une rupture radicale avec le socialisme industrialiste, technologiste, prométhéen (marxiste) qui voulait faire un « homme nouveau » ; et qui, par les « alternatives », prétend aujourd’hui « faire société » (comme si même la société ne devait pas échapper au mythe de la fabrication, comme si c’était un objet alors que c’est la condition préalable à toute fabrication, à toute activité…)
En politique concrète, cela veut dire que quand une proposition programmatique est avancée, on ne se contente pas de se demander si elle est écologiquement soutenable, on se demande d’abord si elle est socialement soutenable. Voilà ce que nous écrivons dans le livre de la MCD qui vient de sortir : « une communauté amish n’introduit jamais une innovation technologique sans organiser au préalable une délibération pour évaluer ses effets sociaux. Si être amish, c’est être averti qu’un mode d’emploi, c’est un mode de vie, alors nous voulons être des amish ! ».
Exemple de l’introduction de la 5G
– Du point de vue de « la vie en société » : on se demande si la 5G va faciliter les communications entre individus (au nom d’un « principe de commodité ») et la réponse est oui.
– Du point de vue de « la vie sociale », on constate qu’il n’est besoin de « faciliter » des relations qu’à condition que les individus soient déjà isolés, séparés, atomisés (par leurs modes de vie) et que donc, toute solution pour « rapprocher des individus isolés » n’est qu’une solution technologique en aval du problème, qui ne va pas changer leur isolement mais juste leur permettre de communiquer entre individus isolés. On s’oppose alors à la 5G car elle poursuit la destruction de la vie sociale et de la vie en commun.
Les 3 jours de (f)estives sont précédés de 4 jours de rencontres
– Par rapport aux (f)estives, il y a plusieurs différences :
- La décroissance y est le thème général
- L’accent est plus mis sur des formats de type ateliers participatifs
- une 1/2 journée pique-nique-ballade est prévue
- Nos repas sont en autogestion : nous prendrons en charge collectivement les repas (alors que pendant les (f)estives, nous bénéficierons des repas de Nathalie)
– Les matinées sont prévues avec l’OPCD
– Pendant ces 4 jours, nous pourrons enregistrer de courtes vidéos (1 mn) sur les propositions politiques de qui voudra
– Repas en autogestion ; logement comme pour les (f)estives (dans le bâtiment ou en tente)
Informations pratiques
Y aller
Où : à Saint-Dié (Vosges). A la MFR du Grand-Est , 88490 PROVENCHERES ET COLROY → C’est ici.
→ Voiture : axe Saint-Dié / Strasbourg par le col de Saâles
→ Bus ligne TER A08 : Saint-Dié / Strasbourg (s’arrêter à la gare de Saâles)
→ Gare de Saâles à 400m (ligne St-Dié / Strasbourg)
La participation financière
Inscription aux (f)estives : 15 € (Gratuit pour les moins de 14 ans et aussi pour les adhérents de la MDC). Paiement : sur place, dès votre arrivée
ou Paiement par chèque : à l’ordre de Maison commune de la décroissance, envoyé à Festives/Thierry Brulavoine La Madeleine 56350 BÉGANNE
Le logement
– Nous disposons de 100 lits dans le bâtiment (vous devez apporter votre sac de couchage), et nous avons obtenu l’autorisation pour des tentes.
– Dans le bâtiment (13€), ou en tente personnelle (6€ – prix indicatif mais déjà calculé au plus près) la nuitée par personne.
Les repas
– Le repas pour les (f)estives (du jeudi soir au dimanche midi) : 5,00 € par repas de midi et du soir (prix indicatif mais déjà calculé au plus près).
– Le repas pour les rencontres (du lundi matin au jeudi midi) : nous disposerons de la cuisine et nous devrons nous autogérer pour prévoir et préparer les repas.
Pour tout contact et informations complémentaires, contactez : Thierry Brulavoine : 06 77 89 09 35 ou par mail