La liste citoyenne décroissante pour les élections municipales au Havre l’annonçait ainsi :
Nous désignerons notre tête de liste le mardi 04 mars à 19h00 au bar Les Zazous, rue Victor Hugo - Le Havre, à l’occasion d’un pot convivial ouvert à toutes et tous.
Quelle que soit la personne désignée, ce ne sera pas nécessairement elle qui s’adressa au public (via les médias par exemple). Nous ferons tourner la parole, et nous nous présenterons par binôme.
Le tirage au sort se fera dans un chapeau. Toutes et tous les colistiers qui "veulent bien" être désignés prépareront un petit papier à leur nom. Nous ferons aussi des papiers pour les étourdis et les absents qui se seront manifestés. Dans tous les cas, n’hésitez pas.
Nous fêterons la constitution de la liste, et surtout notre projet en trois volets (le constat, le Havre en 2050, et les mesures de transition) autour de quelques verres partagés amicalement. C’est ouvert à toutes et tous.
La Stochocratie
La stochocratie, du grec kratein, « diriger, gouverner » et stokhastikos « conjectural, aléatoire », terme inventé en 1998, aussi parfois clérocratie, désigne le tirage au sort (ou élection par le sort) des gouvernants au niveau national ou local.
Les raisons de la stochocratie
- La méfiance : la Grèce classique fut le théâtre d’un constant affrontement entre oligarques et démocrates (on lira de Thucydide sa Guerre du Péloponnèse pour s’en convaincre : au-delà du clivage Dorien & Ionien, l’opposition Sparte & Athènes cristallise la fracture entre oligarques & démocrates). De plus, les cités eurent les plus grandes difficultés à renverser les tyrannies. Le tirage au sort permettait d’écarter les minorités puissantes (les oligarques, les aristocrates) et les quelques individus à l’égo trop marqué (les tyrans, les aisymnètes, les monarques, toute personne soupçonnée d’une aspiration à la dictature ou au pouvoir personnel).
- La religion : les Grecs anciens attribuaient le hasard à la volonté des dieux. De ce point de vue, le tirage au sort assurait que le choix serait meilleur que s’il était fait par les mortels.
- L’idéal démocratique : « Il est démocratique que les magistratures soient attribuées par le sort, et oligarchique qu’elles soient électives » dit Aristote ; choisir les meilleurs (grec aristoi) constitue par définition un système aristocratique, alors qu’un tirage au sort permet de faire participer tout le peuple sans aucune distinction. La démocratie supposant l’égalité des citoyens, le tirage au sort devrait permettre d’avoir le gouvernement le plus représentatif sans craindre l’incompétence.
- La répartition des tâches : les charges publiques étaient lourdes, puisqu’elles réclamaient une présence régulière (voire continue), et la rémunération de cinq oboles par jour (une drachme, c’est-à-dire 6 oboles pour les prytanes) ne représentait que le salaire d’un ouvrier manuel. Ainsi, un tel système permettait de répartir la charge entre tous, et de fait les volontaires devaient être plus nombreux.
Montesquieu a d’ailleurs écrit dans De l’esprit des lois : « Le suffrage par le sort est de la nature de la démocratie. Le suffrage par le choix est de celle de l’aristocratie. Le sort est une façon d’élire qui n’afflige personne ; il laisse à chaque citoyen une espérance raisonnable de servir sa patrie. »
Dimanche 23 mars, vous auriez pu voter pour nous
La liste "2014 : on y croit, on décroit" ne participera pas à la campagne officielle. Les cinquante neuf candidatEs que nous avions présentés résident bien au Havre et sont éligibles mais, pour des raisons administratives, quatre dossiers ont été refusés.
Notre priorité à surtout été donnée aux échanges pour la construction collective d’un projet, et nous nous sommes consacrés aux questions administratives trop tard. Jusqu’à quel point chaque citoyen est en capacité de participer aux débats de société ? Faut-il mettre en place un appareil politique pour déjouer tous les obstacles institutionnels ? Quand toutes et tous sont légitimes à se présenter ...
http://decroissance.lehavre.free.fr/municipales/decroissance2014.jpg Source : Jérôme Sirou http://www.siroublog.com/index.php?la-liste
Dans notre circulaire, nous précisons que le système représentatif n’a plus rien de démocratique. Nous ne nous adressons pas aux citoyens en leur disant "Donnez-nous les clés de la ville, nous savons ce qu’il faut faire pour votre bien-être, nous nous occupons de tout", mais en disant "Voici nos propositions de pistes de transition vers une ville soutenable et souhaitable, pour qu’elles soient appliquées par touTEs et pour touTEs.".
L’enjeu des prochaines décennies est de réorganiser nos sociétés pour "vivre mieux et partager mieux, tout en produisant moins". Il s’agit d’inventer des sociétés relocalisées et sobres ; en quête de sens ; où la démocratie se vit quotidiennement ; où personne ne craint de ne pas avoir l’essentiel et où chacun est responsabilisé ; où les liens sont coopératifs, non-violents et conviviaux. Imaginons d’autres outils de partage que le sacro-saint emploi salarié contraint.
Nous ne profiterons pas de la campagne officielle pour le dire, mais nous continuons à le faire, toujours plus nombreusEs, à travers toutes les actions citoyennes qui construisent dès maintenant des alternatives. Nous n’avons pas besoin d’être élus pour « changer le monde »
Vous trouverez notre circulaire ici : http://www.haute-normandie-decroissance.fr/?p=1132
Le collectif « 2014 : on y croit, on décroit »